Les grandes fortunes prennent leur jets privés pro... pour aller à la plage
Les grands de ce monde adorent prendre leurs jets privés, très polluants, et pas toujours pour le business. Les fortunes françaises ne sont pas en reste... même si c'est souvent bien dissimulé!
Savez-vous comment 98% des participants de la COP 29, la grande conférence mondiale sur le climat qui s’ouvre ce Lundi 11 novembre à Bakou, sont venus en Azerbaïdjan ? En avion… Et beaucoup sont venus dans leur jet privé. Ce n’est pas la première fois que ces puissants viennent défendre l’écologie sitôt descendus de leur Jet! Pour se rendre à la COP28, à Dubaï, l’an dernier, plus de 640 vols privés ont été enregistrés. Ils ont relâché dans l’atmosphère environ 4800 tonnes de CO2. Pas joli joli…
Bernard Arnault, troisième fortune mondiale, dans son jet privé, en 2022.
Ces chiffres proviennent d’une étude publiée il y a quelques jours par Communications Earth and Environment (CEE), proche de la revue Nature. Elle montre que les émissions mondiales de CO2 provoquées par les 26000 jets privés ont atteint 15,6 millions de tonnes l’an dernier, pour 4 millions de trajets. C’est une hausse de 46% depuis 2019, ce qui signifie que leur contribution au réchauffement de la planète, longtemps marginale, finit par peser. Pour Milan Klöwer, un chercheur de l’Université d’Oxford (GB), “L’aviation privée a beau ne représenter qu’une petite partie du trafic aérien commercial, cette étude démontre que leur contribution au réchauffement planétaire est disproportionnée.”
Taylor Swift, très fan des déplacements en jet privé, pour aller à ses concerts… ou faire du shopping.
Pas très… professionnels
On objectera que ces déplacements des grands responsables de la planète, chefs d’entreprise ou dirigeants politiques, sont nécessaires pour la paix et la prospérité mondiale. Sauf que les chiffres ne disent pas cela. Pas du tout. L'étude du magazine CEE, réalisée par des universitaires suédois, allemands et danois montre un recours « saisonnier évident, avec une pointe estivale » à ces vols privés. En Europe, par exemple quelles sont les destinations favorites des grands de ce monde ? Réponse : les Baléares et la Côte d'Azur. Plus globalement, les voyages de ces jets semblent a priori peu professionnels puisque les pics de déplacements concernent, par ordre décroissant, le Super Bowl (finale de football américain) ; la Coupe du Monde de football 2022 au Qatar ; le festival de Cannes et… (quand même !) les rencontres économiques de Davos.
Très glouton
Autre objection : ces vols privés ne représenteraient que 1,6 à 1,7% des missions globales. « Certains nous disent que c’est négligeable et qu’il n’y a pas de quoi s’affoler » remarque Stefan Gössling, co-auteur de l’étude et chercheur sur le climat à l’Université suédoise de Linnaeus, “ mais en fait, il faut raisonner dans l’autre sens : sI des gens peuvent émettre des milliers de tonnes de C0² sans conséquences, pourquoi voulez-vous que quiconque se préoccupe de réduire ses propres émissions ? Or il faut savoir qu’en une seule heure de vol, un jet privé peut émettre davantage qu’un citoyen lambda en une année. »
Jets tricolores
Et la France dans tout cela ? Il existe en France environ 300 jets privés. Mais dans la réalité, beaucoup plus fréquentent les tarmacs de nos aéroports, car les grands patrons français ont appris à se cacher de ceux qui traquent leurs déplacements en jets. Ainsi, Bernard Arnault, dont l’empreinte carbone dépasse pourtant les 9000 tonnes de CO2 par an a-t-il pris le soin de se séparer en 2022 de son jet personnel. Il voyage toujours autant, mais en louant des jets privés appartenant à des compagnies immatriculées dans des pays qui ne permettent pas toujours d’en connaitre les propriétaires effectifs. Comme le Luxembourg, le Portugal et les Iles vierges. C’est ce qu’a montré une récente enquête du Monde…
Direction… Ibiza
La vérité, c’est que nos grandes fortunes tricolores sont, elles aussi, très fan des jets privés. « 80% des déplacements sont pour des motifs professionnels » assure Charles Aguettant, président de la branche française de European Business Aviation Association (l’Association européenne de l’aviation d’affaires). Pourtant, en France aussi, le trafic s’envole en été et à destination du soleil : sur les 5 aéroports les plus fréquentés par les jets privés, trois (Nice, Ibiza et Olbia) sont des destinations très touristiques.
200 siècles d’empreinte carbone
L’utilisation de jets privés est aussi très concentrée. L’an dernier, une cinquantaine de jets privés appartenant à des groupes comme Total, Michelin, Bolloré et le groupe Pinault ont consommé au total l’équivalent de 200 siècles d’empreinte carbone d’un Français moyen, selon une enquête de Mediapart de juillet dernier. En un an, ces 50 jets privés français ont fait l’équivalent de 270 fois le tour de la Terre, avec 11000 vols, 11 millions de kilomètres, et 80 000 tonnes d’équivalent CO2 relâchées dans l’atmosphère. Impressionnant. Déprimant.